A l’occasion de la Journée Portes Ouvertes du lycée Louis-Bascan, vous êtes tous conviés au débat philosophique qui aura lieu samedi 30 mars 2019 de 10h30 à 11h30 (au CDI, bâtiment F, 1er étage)
« De quels citoyens la démocratie a-t-elle besoin ? », nous étions-nous déjà demandé dans un de nos débats.
Nous poursuivions l’année dernière par cette question : « Avons-nous besoin d’intellectuels ? ».
Ces interrogations en appelaient sans doute une autre, qui nous permette de dessiner encore un peu plus le portrait de la vie publique que nous partageons : les systèmes de représentation sont-ils satisfaisants ?
Selon les sondages, la réponse paraît évidemment négative.
Tous les observateurs s’entendent pour diagnostiquer une « crise de la représentation ».
Certains par exemple demandent que le statut des élus soit précisé, que leurs fonctions soient mieux définies, que leur nombre même soit revu à la baisse, afin qu’on puisse plus efficacement contrôler leur concours à la définition du bien commun.
D’autres mettent en question plus radicalement les institutions en vigueur, remarquant l’inquiétante montée de l’abstention lors des élections, et la défaillance des relais d’information et d’expertise.
Or, les quatre principes du gouvernement représentatif – « l’élection des gouvernants par les gouvernés à intervalles réguliers, l’indépendance relative des gouvernants, la liberté de l’opinion publique, la prise de décision après l’épreuve de la discussion publique » – n’ont pas cessé d’être appliqués durant les dernières décennies, comme le soulignait Bernard Manin en 1995 (Principes du gouvernement représentatif, Ed. Calmann-Lévy [rééd. Coll. Champs/Flammarion, p. 252]).
Mais est-ce qu’à la longue l’exercice démocratique du pouvoir devrait toujours opposer les gouvernants et les gouvernés ?
L’excitation qui agite par moments, et parfois violemment, l’espace public, ne compense pas l’anesthésie dont souffre ordinairement le corps politique ; et toute idée du bien commun, toute émotion du vivre-ensemble, semblent se perdre dans les méandres labyrinthiques de la communication et dans la rumeur amère des réseaux sociaux.
La dynamique du débat, nous dit un analyste de la « gouvernance », requiert « une qualité essentielle : avoir le courage du désarroi, face aux transformations et aux incertitudes » (Yann Coatanlem, Le gouvernement des citoyens, Ed. PUF, p. 345).
Un tel avertissement nous invite surtout à relever les paradoxes de nos aspirations collectives.
Partons peut-être de ce paradoxe, formulé par un philosophe : « en démocratie, l’art de gouverner est un art d’être gouverné.
Celui-ci est tout aussi difficile que celui-là, pour autant qu’être citoyen – et même un peuple – est moins un droit qu’un terrifiant devoir, qui fait de nous les responsables de la chose publique » ; « comment », pour le dire tout bonnement, « réconcilier la liberté du dèmos et la puissance du kratos » (Pierre-Henri Tavoillot, Comment gouverner un peuple-roi ? Traité nouveau d’art politique, Ed. Odile Jacob, p. 10) ?
Débattons-en ensemble !
É. Akamatsu, Professeur de philosophie
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